Le fils prodigue
Le fils prodigue a 20 ans. Il a terminé ses études pour devenir chef d’entreprise. Il est vaillant, souriant et plein de joie, bref, il est le visage même d’un beau rêveur. Après ses cours, il va à la rencontre de ses amis et participe activement à la vie de l’église. C’est un chrétien fervent et assidu.
Le fils prodigue a 25 ans. Il a terminé ses études, et a commencé un premier job en tant que jeune assistant de bureau. Il n’est plus aussi fougue qu’avant, mais a gardé ce sourire si jovial qui le caractérise si bien. Il se passionne toujours autant pour les voies de son Seigneur et s’applique avec beaucoup d’entrain. Même si elles sont épisodiques, certaines questions de la vie commencent à éveiller un brin d’inquiétude en lui.
Le fils prodigue à 30 ans. Il a le visage d’un homme et a un regard affirmé. Il devient chef d’une petite équipe, mais semble frustré par le chemin que prend sa vie. C’est le temps pour lui d’avoir des certitudes sur son avenir. Les questions de la vie sont plus fréquentes et il semble avoir du mal à trouver ses réponses. À 30 ans, il se voulait marié, père, propriétaire et chef. Ses rêves aussi éloignés que pourrait l’être le soleil de la terre. La voix du Seigneur semble difficile à comprendre, et ses projets pour lui ne semblent pas aller vers ses ambitions personnelles. Le fils veut réussir vite, mais la souveraine sagesse le fait encore attendre. Le fils est las et refuse d’attendre. Il veut tout, tout de suite.
Le fils prodigue à 40 ans. Depuis la dernière fois, cela fait bien 10 ans qu’il a choisi de quitter le chemin qui lui était promis. Eh quoi ?! Un bon salaire, un beau cadre de vie et une belle femme, n’est-ce pas là le rêve du commun des hommes ? Pourquoi se sentirait-il mal après tout, qu’a-t-il fait, si ce n’est qu’il a fermé son entendement à la douceur des paroles sages. Le voici époux, père, propriétaire et chef, et pourtant, son visage semble si éteint. N’y a-t-il pas vu un signe du Seigneur dans tout ceci ? Son cœur semble perdu. Il sourit, mais ne semble pas heureux, il parle, mais est si absent. Il s’est avancé très loin de la maison de son père et le ressent. Il ne sait plus quoi faire, voici tant d’années qu’il ne parle plus à son père.
Le fils rebelle a maintenant 60 ans. Le temps passe, il n’est plus si jeune. Ses dettes et ses crédits sont devenus ses principaux sujets. Ses enfants et sa femme ne manquent de rien, sauf d’un père et d’un mari attentif. Son cœur est vide, il est rempli de frustration. En lui, jugule le sentiment d’avoir laissé passer le train et d’avoir oublié quelque chose d’important. Ce qu’il a abandonné sur son chemin n’est plus, et il ne le retrouve pas. Alors il avance, quand il est avec moi, mais il ne sourit plus, et quand il me parle, il ne me regarde plus. Il ne ressemble plus à celui qu’il était.
Le fils rebelle a dépensé tout ce qu’il a. Cette fois-ci, il s’est vraiment éloigné de moi. Il ne se souvient ni de mon nom ni de ma voix. Il erre à gauche pour revenir à droite, tantôt il s’insurge, tantôt il m’injure. Depuis qu’il a pris son manteau et qu’il a quitté ma maison, je le vois pleurer, son cri me fond le cœur. Il crie et m’appelle, mais c’est trop tard. Voici tant d’années qu’il a quitté ma maison, il ne connaît plus mon nom ni le chemin de ma demeure. Aujourd’hui, il vit, mais demain il ne sera plus.